De Jean-Paul Sartre
Mise en scène de Jean-Paul Tribout
Du jeudi 18 au vendredi 19 décembre 2008
au Théâtre Municipal Raymond Devos, Tourcoing (F)
Spectacle à l’abonnement
Production : Seart-Art Production (Paris)
Co-production : Théâtre 14 (Paris), Scène et Public (Paris)
.
Avec : Catherine Chevalier, Henri Courseaux, Emmanuel Dechartre, Jacques Fontanel, Marie-Christine Letort, Laurent Richard, Jean-Paul Tribout, Xavier Simonin et Eric Verdin.
.
Durée du spectacle : 2h00 (sans entracte)
L’unique comédie écrite par Jean-Paul Sartre. Une satire hilarante du monde de la presse et de la corruption de certains journalistes, menée tambour battant par une solide distribution qui donne toute sa dimension comique et politique à cette œuvre atypique du philosophe de l’existentialisme, écrite en pleine Guerre Froide mais au propos d’une étonnante actualité.
NEKRASSOV
Dans le Paris du milieu des années cinquante, le journal Soir à Paris se fait un devoir d’entretenir la Guerre Froide en remplissant quotidiennement sa page cinq d’une propagande anti-communiste éhontée. Le jour où il demande une augmentation, Sibliot, le journaliste en charge de cette rubrique, tombe en disgrâce aux yeux de son patron qui envisage alors de le renvoyer. C’est à ce moment que, fuyant la police, Georges Valera, un arnaqueur patenté, spécialiste de l’usurpation d’identité, surgit par la fenêtre dans le bureau du journaliste. Après avoir voulu le dénoncer à la police, Sibliot se laisse finalement convaincre par l’escroc de sauver sa place en montant un bon coup. Valera se fait passer pour Nekrassov, un ministre soviétique dont Sibliot a remarqué l’absence à plusieurs manifestations officielles à Moscou. Les colonnes de Soir à Paris accueillent alors les révélations de ce pseudo transfuge détenteur d’importants secrets stratégiques. Si, comme prévu, les ventes du journal décollent dans le contexte de campagne électoral qui agite alors la capitale, les compères doivent faire face aux répercussions inattendues de leur petit manège...
Nekrassov est une réflexion sur les contradictions humaines, sur la place de la morale face au désir de la réussite individuelle, sur la manipulation généralisée. Une charge contre la corruption des médias et leur absence d’éthique. En nous faisant redécouvrir cette farce politique aux répliques ciselées par Jean-Paul Sartre, Jean-Paul Tribout, le metteur en scène, répond par l’affirmative à Roland Barthes qui s’interrogeait sur la pertinence d’investir les codes du théâtre bourgeois pour tenir un propos résolument critique et progressiste. S’appropriant les codes de la comédie boulevardienne avec une sincère bienveillance mais aussi avec la distance entre deux époques séparées par un demi-siècle, cette mise en scène de Nekrassov assume de confier à une dizaine d’acteurs brillants et à la joie communicative la trentaine de rôles de la pièce. Elle s’éloigne ainsi d’un naturalisme qui enfermerait la pièce dans son temps, sans rien lui ôter de la nécessaire inscription historique de son propos.
Extrait
Il y a sept ans, patron, vous décidâtes de consacrer la cinq à combattre la propagande communiste et vous me fîtes l’honneur de me la confier tout entière. Depuis je m’épuise à la tâche : je compte pour rien d’avoir perdu ma santé, mes cheveux, ma bonne humeur et si pour vous servir, il fallait devenir plus triste et plus quinteux encore, je n’hésiterais pas un instant. Mais il est un bien auquel je ne puis renoncer sans que le journal lui-même souffre : c’est la sécurité matérielle. (...) Comment trouver l’épigramme vengeresse, la remarque au vitriol, le mot qui ne pardonne pas, comme peindre l’Apocalypse qui nous menace et prophétiser la fin du monde si mes souliers prennent l’eau et si je ne puis les faire ressemeler ?